dimanche 22 mars 2015

Ecotrail de Paris

Avant de courir l'Ecotrail de Paris, je n'avais jamais couru plus long qu'un marathon (distance déjà impressionnante et insurmontable pour moi il y a moins de deux ans). J'avais fait quelques trail, mais rien de très long. Je me suis lancé le défit de l'écotrail (80km, ça fait un gros chiffre) un peu comme on se jette dans le grand bain alors qu'on a appris à nager là où on avait pieds : normalement, ça passe mais c'est un peu l'inconnu. 

Après avoir passé un peu plus d'1 an à courir dans mon coin lors de mon année loin du monde du travail, je cours depuis janvier avec l'UASG. J'ai eu la chance d'y trouver un groupe super accueillant. J'ai aussi pu y trouver tout un groupe qui préparait aussi l'écotrail et parmi eux, Arnaud, un autre "fou" qui n'avais jamais dépassé le marathon, qui s'était inscrit sur le 80km et semblait partant pour essayer de le faire sur une base "entre 9 et 10h" (avec comme objectif principal de finir même si on dépassait le temps). 
Nous avons pu nous entraîner ensemble et préparer notre stratégie de course en nous inspirants des temps d'amis qui avaient déjà fait la course les années précédentes : 
  • Buc (22km) : 2:20 - 2:25
  • Meudon (45km) : 5:10 - 5:20
  • Chaville (55km) : 6:35 - 6:50
  • Saint-Cloud (67km) : 8:10 - 8:30
  • Tour Eiffel (77.5km) : 9:25 - 9:50
En plus de ces temps de passages, nous avions reçu de précieux conseils : 
  • Ne pas partir trop vite au départ
  • Faire attention de ne pas se tordre une cheville dans le pré du départ qui est plein de trous et où on est pas chauds
  • Ne pas chercher à courir dans les montées
  • Bien s'hydrater et bien manger jusqu'au bout


Le jour de la course, un départ à midi me permet de me lever et de déjeuner tranquillement. Par contre, l’en-cas de 10h que je pensais ajouter n’inspire pas mon estomac (oui, je parle de mon estomac comme d'une entité à part mais il semble souvent avoir une vie propre et ne se plie pas forcément à ma volonté). 
J'arrive sur le site de Saint-Quentin vers 10h30 et j'ai le temps de poser mon sac et boire un petit thé avant de repérer les oreilles de Carole qui dépassent de la foule. 
Elle a décidé de courir en fivefingers malgré le fait qu'elle n'a commencé à les utiliser que depuis quelques semaines. Moi qui ai du répondre à tant de personnes qui doutent de ma capacité à courir 80km de trail avec mes Spyridons (alors que je ne cours qu'en fivefingers depuis 1an et 1/2), je suis admirative de sa capacité d'adaptation. 
Nous en profitons pour comparer les différences de nos modèles respectifs et débattre sur les avantages et inconvénients des lacets et scratchs. 

Le temps passe et je sais que mes acolytes de l'UASG ne doivent être pas loin. Je commence à chercher le point de rendez-vous décrit par Matthieu mais ce n'est que quand Olivier me téléphone pour me dire  qu'il a un maillot pour moi et quand il me décrit le lieu que j'arrive à les retrouver. 



Tout le monde est dans ses préparatifs finaux, les petits rituels, les pansements pour éviter les échauffements, les crèmes pour éviter les ampoules, le choix de la tenue et de ce qui doit être emporté dans le sac à dos, ...



Je n'ai pas de crème pour les pieds mais, par contre j'ai les doigts de pieds glacés et je dois les frictionner pour les garder à une température correcte.



Une fois tous prêts et l'heure approchant, nous allons nous placer derrière l'arche (Arnaud et moi, bien derrière - nous n'envisageons pas de filer comme des flèches au démarrage)
Nous sommes conscients que maintenant, on y est pour de vrai. Même si nous n'avons pas de record à battre, la pression commence à monter. 



Mais on n'oublie pas de sourire quand même le temps d'immortaliser l'instant.



Les autres se sont placés plus à l'avant et, même s'ils ont de gros objectifs, ils profitent des dernières minutes de décontraction. 



Le départ est donné, heureusement, le pré est large et permet de laisser filer ceux qui veulent le faire et de prendre le temps nécessaire à nous mettre dans la course. Le temps d'un tour complet de la base donne la possibilité aux accompagnateurs de se placer vers la sortie et de nous faire un dernier signe.



Peu après, Jean-Marc, un autre coureur de l'UASG que connaît Arnaud, se joint à nous.
Les 22 premiers kilomètres sont faciles : du plat et juste quelques montées avant le premier ravito. 
Nous rencontrons le fameux pont qui ondule (oui, j'ai lu les CR des années précédentes mais je ne m'imaginais pas avoir un espèce de mal de mer sur un trail à cause d'un pont qui fait des vagues ;-))



Bref, l'ambiance est détendue mais studieuse et on a presque l'impression de faire une petite balade dans les bois avec plein de monde. 




Arrivés à Buc, j'ai juste le temps d'apercevoir et de faire un petit coucou à ma famille qui est à l'entrée du ravitaillement avec des pancartes d'encouragement.




Nous remplissons nos poches à eau, je mange du saucisson, du fromage (un ravitaillement comme j'aime), des raisins sec et bois un verre d'eau gazeuse.



Un tour aux toilettes (on ne sais pas quand il y en aura d'autres et il n'y a pas trop d'attente) et on se rend compte que le temps file vite. 
Nous repartons pour la suite avec un bon rythme mais la connaissance du profil de course nous oblige à penser à la difficulté de la portion qui nous attend. 



La deuxième partie est effectivement bien plus difficile : c'est la plus longue, on attaque du dénivelé (mais on est finalement contents d'avoir des montées pour se mettre à marcher et pouvoir se remettre à courir plus facilement après). Les jambes commencent à se faire sentir (pour moi, surtout les fessiers et un peu les cuisses). 

C'est là où commence aussi à vraiment se mettre en place naturellement le système de relais car la fatigue commence à poindre son nez (et je sens bien que les nuits enrhumées de cette dernière semaine n'ont pas aidé - pour mon coéquipier, c'était ses enfants malades qui lui ont abrégés ses nuits). Lorsqu'un de nous est fatigué, l'autre prend naturellement place devant et maintient le rythme. Le "fatigué" n'a plus qu'à suivre sans se poser de question. 


Les montées et descentes s’enchaînent et nous perdons Jean-Marc. Le grand nombre de courses qu'il a faites ces derniers temps doit finir par avoir eu raison de lui. 
C'est aussi la portion où on dépasse la moitié du parcours et la distance d'un marathon. Une fois ces points passés, on se dit qu'on a déjà fait plus qu'on a jamais fait et que malgré les tiraillements musculaires, on est plutôt en bonne forme : pas de crampe, pas de douleurs particulière aux pieds (même si je sais qu'un de mes orteils va être sûrement un peu bleu parce que c'est toujours avec le même que je tape dans les pierres et racines). 
Nous arrivons à penser à boire et avaler des compléments énergétiques régulièrement (Arnaud est avec des gels classiques, moi j'ai un gel à la tomate qui se mélange directement avec mon eau quand je bois)




Peu après, mon téléphone décide que 22% de batterie ne suffisent plus à le maintenir allumé et s'éteint complètement (plus de photos pour moi et plus de suivi pour ceux qui suivaient grâce au gps de ma montre).
On voit que notre temps à l'approche de Meudon est toujours dans le plan et ça nous motive. On sait aussi qu'après ça, les ravitaillements, c'est tous les 10km.
Le ravitaillement de Meudon est tellement en plein vent et dans le froid que ma première pensée va aux bénévoles qui nous accueillent en nous applaudissant. Nous essayons d'être efficaces et de ne pas nous éterniser pour ne pas trop nous refroidir mais c'est difficile d'être rapides. 


Ma famille n'a pas trouvé l'emplacement du ravitaillement de Meudon et je suis contente de voir qu'ils ont trouvé notre itinéraire et sont présents vers l'observatoire.









Je profite de mon équipe de supporters pour leur demander de me préparer un paquet de mouchoirs pour le prochains ravitaillement (j'en ai encore mais je ne suis pas sure d'arriver jusqu'au bout - c'est chouette de courir avec le nez qui coule) . 

Nous avons déjà un bon nombre de kilomètres dans les jambes mais j'ai encore assez d’énergie pour faire le pitre (j'espérais un joli monkey-trail malheureusement l'appareil photo n’était pas amusé apparemment)




Après un petit tour vers l'observatoire, nous repartons dans les bois en direction de Chaville. 

Les kilomètres me semblent longs mais on sait qu'il n'y en a que 10 pour arriver au ravito et ça aide à maintenir le rythme : sur le plat (ou quasi) on court, en montée on marche et en descente on gère en fonction du dénivelé et des embouteillages de coureurs.


En arrivant à Chaville dans le temps prévu (il fait encore jour), on sait que même si ça devient dur, on va finir la course : avec les temps qu'il nous reste avant la barrière horaire et les 20km qui nous séparent de l'arrivée, on sait que même en marchant ça serait faisable. Savoir ça ne nous démotive pas. Au contraire, on sait qu'on tient cette course et que maintenant, tout ce qu'on fait en courant c'est pour ajouter un bon temps à notre capacité à finir, rendre fiers ceux qui nous ont soutenu, prouver à ceux qui doutaient (dont parfois nous faisions nous-même parti) qu'on a le physique et le mental.
Je profite de la soupe chaude (aussi à la tomate - il y a comme un leitmotiv ici) et enfile un tshirt supplémentaire pour lutter contre le froid qui commence à se refaire sentir. 
Nous profitons de l’arrêt pour suivre encore un des conseils des "anciens" : à Chaville, on s'équipe pour la nuit. on repart donc avec nos brassards réfléchissants et nos frontales (encore éteintes) en place.


Les kilomètres jusqu'à Saint-Cloud sont à la fois semblables et très différents. La nuit arrive, on doit faire plus attention à ne pas se prendre les pieds dans des racines et cailloux et on fini par allumer nos frontales. A la fois, on a hâte d'arriver et en même temps, on profite de nos derniers kilomètres au milieu des arbres et avec des montées (si on n'a plus de montées, quelle excuse on va avoir pour marcher de temps en temps ;-)). Effectivement, quand on arrive à Saint-Cloud, il fait nuit noire. Ma famille est là et après quelques photos (où j'ai perdu mes yeux à cause du flash), je les quitte en leur donnant rendez-vous à la tour Eiffel.



La descente de Saint-Cloud vers Paris se fait finalement beaucoup plus facilement que ce que je ne craignais en regardant le profil de la course. La fatigue se fait clairement sentir mais nous savons que nous ne devons pas flancher si nous voulons tenir l'objectif de -de 10h (bien sur c'est surtout finir mais là on sait qu'on peut le faire si on ne craque pas). On reprends donc, encore plus qu'avant, notre technique de relais pour garder la vitesse. Ma montre est la seule encore en service et je fais le décompte de la distance restante. Certaines parties du parcours sont vraiment peu agréables mais on voit la tour Eiffel qui semble toujours trop loin.
Enfin quand on arrive à son pied, il faut passer au milieu des touristes qu'heureusement les bénévoles écartent pour nous permettre de passer. Je vois mes parents, ma belle-sœur, puis entend mon frère m'encourager. Je n'arrive plus à respirer tellement je souris mais je dois me reprendre car il reste les marches. 


Nous attaquons l'ascension côte à côte avec Arnaud et montons pas très rapidement mais sans nous arrêter. Arrivés en haut, nous passons la ligne ensemble pour un classement ex-æquo sur une course courue en binôme.





Après ça, une petite bière pour marquer le coup quelques photos avec les lapins qui arrivent peu après.


La descente se fait par l'ascenseur mais il faut jouer des coudes avec les hordes de touristes qui descendent du 2ème étage. Heureusement, la personne aux commandes à limité le nombre de passagers au 2ème pour qu'il nous reste de la place. 
Arrivée en bas, le froid et la fatigue commencent à se faire douloureusement sentir. 
 

Comme après chaque grosse course que j'ai fait jusqu'à présent, au moment où je passe la ligne d'arrivée, c'est comme si mon organisme entier recevait l'instruction d'arrêter de brûler des calories pour rien. 
Je me sens épuisée et frigorifiée. J'ai tellement froid que c'est en claquant des dents que je rejoins le camion qui contient nos sacs confiés au départ et que j'annonce mon numéro de dossard à la personne responsable de nous les restituer. 

J'ai tellement froid et je suis tellement fatiguée que je ne m'imagine pas rentrer à pieds jusqu'à chez moi (normalement on devait prendre le RER C mais il est en travaux). Mon père a la gentillesse d'aller chercher la voiture pendant que je vais me réfugier dans le gymnase heureusement bien chauffé. Je croise rapidement quelques membres de l'UASG en train de se ravitailler mais je cherches la zone de massage. Après plusieurs tours dans les couloir, les accompagnateurs d'un participant m'indiquent enfin le bon escalier à prendre et je peux enfin laisser mes jambes aux mains d'une gentille kiné qui les ré-assouplis et leur permet de se réchauffer.
Arnaud n'a pas non plus de RER mais semble beaucoup plus d'attaque que moi et est décidé à trouver d'autres lignes de métro pour rentrer chez lui.
Je lui dit rapidement au revoir et bonne chance avant de rentrer chez moi pour une douche et un bain chaud bien mérités.


Bilan de la course : super contente du résultat mais aussi du déroulement qui s'est vraiment passé comme planifié.


Du début à la fin, nous avons fonctionné en équipe. Quand nous pouvions, nous courions ou marchions de front ou en léger décalage. Quand un de nous deux était un peu plus fatigué, l'autre prenait le lead et celui qui était dans un passage plus difficile suivait sans réfléchir. On se rappelait mutuellement de boire ou manger. On discutait pour faire passer le temps et pour s'encourager. Bref, un binôme qui a super bien fonctionné. 
On a aussi suivi les consignes du coach et des "anciens" à la lettre : à chaque fois qu'on attaquait une côte (même les premières), on marchait.  Pendant tout le trajet, on regardait principalement le nombre de kilomètres déjà parcourus et le temps de course. On ne s'inquiétait pas de notre allure et on était principalement au ressenti : on est resté sur notre rythme sans chercher à se mettre dans le rouge mais sans chercher à se freiner dans les parties vraiment roulantes (on cherchait juste à être dans une allure sans effort). 


Côté expérience, c'est vraiment une grosse avancé pour moi. Maintenant, je sais que je peux le faire et je ne vais pas me priver de repartir sur d'autres trails longs. 

Côté bobos :  
  • Une ampoule au bout d'un doigt de pied
  • Des bleus au même doigt de pied de l'autre pied (c'est pas ma faute s'ils dépassent)
  • Une petite écorchure à cause d'une brindille qui est restée dans ma chaussure
  • Une écorchure au milieu du dos (merci à mon attache de soutient-gorge)
  • Des grosses courbatures aux cuisses et fessiers
  • Des courbatures plus faibles mais présentes partout ailleurs
Bref, rien de bien méchant et j'ai pu reprendre la course sans soucis dès la fin de semaine (même si je me suis sentie globalement fatiguée, je sentais que mon organisme est prêt à se remettre en route tranquillement et que j'avais besoin de bouger).









Merci à Arnaud pour avoir été un super binôme, à ma famille pour m'avoir encouragée avant pendant et après la course, à Yana, ma colloc pour arriver à allier une journée de bénévolat pour tous les autres coureurs et reporter et assistance pour moi au moment de mon arrivée à la tour Eiffel, à Olivier pour m'avoir prêté un maillot et ainsi permis de porter les couleurs du club, à Olivier, Matthieu, Free, pour leurs précieux conseils, à Gilles pour les conseils d'avant course et les sms pendant la course (heureusement que le téléphone d'Arnaud marchait encore), à Carole et Emir pour leur bonne humeur sur chacune des courses où je les croises, aux membres de l'UASG qui m'ont accueillis et à ma société Ossia qui me soutient pour mes participation à toutes ces chouettes courses.